jeudi 20 juin 2013

La voiture des cantinières-vivandières modèle 1881 (Mots-clés : vivandières, cantinières, cantinière, vivandière)


En mars 1914, Le Petit journal titrait "Celles qu'on ne verra plus sur les champs de bataille". Un dernier hommage à la "fin des cantinières" qui n'eurent pas le mérite d'entrer dans la Grande Guerre avec leur petite voiture. Le véhicule des cantinières est tout aussi emblématique que leur fameux tonnelet tricolore. Moyen de transport utilisé dès le premier Empire, le fourgon de cantinière, souvent un simple chariot à ses débuts, évolue avec le temps.

En 1881, une note émanant du ministère de la Guerre parait sur "la voiture de la cantinière-vivandière" adoptée par décision ministérielle comme voiture type pour tous les corps de troupe. Cette note est approuvée le 24 août 1881.

Voici, en substance, ce qu'elle dit :

"Afin d'amener une uniformité, très désirable à tous les points de vue, dans les voitures dont se servent les cantinières et qui sont quelquefois de lourds et incommodes véhicules, difficiles à traîner en campagne et encombrants lorsqu'il s'agit de les transporter par voies ferrées, le service de l'artillerie a été invité à faire étudier une voiture présentant des conditions de volume et de poids en rapport avec les moyens de traction mis à disposition des cantinières-vivandières.
Cette voiture, après avoir été soumise, dans plusieurs corps d'infanterie et de cavalerie, à des épreuves de roulement et des essais de chargement qui ont donné des résultats satisfaisants, a été adoptée comme type et au fur et à mesure du remplacement de leurs voitures actuelles, les cantinières devront être munies d'une voiture semblable ; en cas de mobilisation, elles ne pourront se servir d'aucun autre modèle.
Afin de faciliter aux intéressés la construction de leurs voitures pour l'industrie, il a été établi des planches de dessin indiquant les données principales qui devront servir de guide dans cette construction. Toutefois, les cantinières pourront aménager l'intérieur de leur voiture comme elles le jugeront convenable, mais elles seront astreintes à se conformer aux dimensions extérieures du corps de voiture et à na pas dépasser les poids de la voiture type, qui est de 625 kilogrammes. Elles devront aussi faire peindre les parties extérieures de la voiture et les roues à la couleur vert-olive, employée par le matériel des équipages militaires, les ferrures seront rechampies en noir. L'intérieur de la voiture et du cabriolet pourra être peint en blanc, ou en gris clair ou en jaune foncé.
En outre, et afin de permettre en campagne le remplacement des roues et des essieux qui viendraient à manquer, ces principaux éléments de la voiture devront être, de tous points, conformes aux modèles en usage dans le matériel des équipages."

Cantinière-vivandière du 16e régiment d'infanterie. Derrière elle un fourgon réglementaire. 


Sur les flancs des voitures de cantinières des marques peintes indiquent le nom de la propriétaire, l'unité à laquelle elle appartient. Voici quelques exemples :

Mme Crosnier cantinière
17e Regt de chasseurs
2e division de cavalerie
2e brigade

Equipages régimentaires
18e régiment d'infanterie
15e corps
Baudoin cantinière
? bataillon

Ou encore :

Corps d'armée des troupes coloniales
2e division
1re brigade
1er régiment d'infanterie coloniale
1e bataillon
Mme ??? cantinière

Les informations sont parfois plus courtes :

Mme Bonnot
cantinière-vivandière
9e dragons

Ou encore :

Mme Lafon cantinière
au
4e bat. d'artillerie à pied




Une circulaire du 7 août 1883, du ministère de la Guerre, indique qu'en temps de guerre les voitures doivent être attelées à deux chevaux :

"Les cantinières qui consentiraient à faire l'achat d'un deuxième cheval, pourront atteler leurs voitures à deux chevaux dès le temps de paix, mais il doit être établi que cette acquisition est absolument facultative et ne saurait leur être imposée comme une obligation."

Le 29 mai 1884, le comité d'artillerie envoie aux corps de troupes la note suivante :

"Les essais faits dans les corps de troupes sur le nouveau type de voiture de cantinière-vivandière adopté le 3 juin 1880, ont permis de reconnaître qu'un seul cheval suffisait pour l'attelage lorsqu'on parcourait des chemins ou des routes ordinaires ; mais, comme la voiture peut, en raison de sa capacité, recevoir un chargement plus considérable et de nature à satisfaire plus facilement aux besoins qui se produiront en campagne, il a paru nécessaire d'atteler à deux chevaux , en temps de guerre, toutes les voitures des cantinières-vivandières."

Ces diverses notes laissent la porte ouverte aux interprétations et c'est ce que montrent les photographies d'époque. Mais pas le temps de voir un modèle fixe et définitif s'imposer. Les cantinières constatent que leur métier disparaît inévitablement. En 1914 le journal L'Excelsior publiait l'information suivante :

" Depuis quelques années, les règlements militaires ne faisaient plus mention des voitures de cantinières dans les trains de combat des diverses unités. Mais on croyait volontiers, dans le public, qu'on les verrait apparaître encore sur le champ de bataille et que, pour avoir perdu le droit de porter leur pittoresque uniforme, les cantinières n'en conserveraient pas moins la faculté de suivre nos soldats en campagne." 

Le ministère de la guerre donna la réponse suivante pour lever le doute : 

"les cantinières en dehors du temps de paix, n'ont plus d'existence légale. A la première heure de la mobilisation, l'autorité militaire peut réquisitionner leurs chevaux et leurs voitures. (...) Et les cantinières peuvent tout au plus continuer d'habiter à la caserne leur logement habituel." Le chapitre est clos, la guerre le fera oublier.

"Ainsi se termine officiellement la tradition des cantinières", conclue Le Petit journal du 22 mars 1914.


Frédéric Pineau


Note : une bonne partie des informations de cet article sont tirées du livre du capitaine Richard, Cantinières et vivandières françaises, du Petit journal et de L'Excelsior.

lundi 3 juin 2013

Livre : Hôpitaux militaires dans la guerre, 1914-1918, François Olier et Jean-Luc Quénec' hdu (Mots-clés : Grande Guerre, infirmières, service de santé, hôpitaux)


En 1979 sortait le Catalogue oblitérations Croix-Rouge, 1914-1918*, de Max Altarovici. Entièrement consacré à la marcophilie et à l'histoire postale de la CRF (SSBM, ADF, UFF) du premier conflit mondial, ce catalogue de 270 pages donnait une classification par département des structures de la CRF et du service de santé des armées. Un ouvrage de base, enrichi de reproductions de cachets faits à la main et de cartes postales d'époque. Il n'avait nullement la prétention de répertorier ou d'estimer la totalité des estampilles et marques relatives au sujet. A cette époque n'existait pas internet et les sites de vente en ligne permettant d'approcher une certaine exhaustivité. Cependant, une merveilleuse base pour commencer, aujourd'hui encore.





Depuis 2008, les éditions YSEC ont eu la merveilleuse idée de publier la série qui vient renouveler l'étude de 1979. Pas un ouvrage mais cinq ! Répondant au titre de Hôpitaux militaires dans la guerre, 1914-1918, ce répertoire général des marques postales sanitaires écrit et mis en oeuvre par François Olier, major du service de santé de l'armée de terre, et Jean-Luc Quénec'hdu, ingénieur chimiste de formation, est une résurrection.

Chaque tome présente une zone géographique :

Tome 1 : France nord-ouest (2008) 302 pages, 600 illustrations
Tome 2 : France centre-est / Paris (2010) 320 pages, 950 illustrations
Tome 3 : France sud-ouest (2013) 333 pages, 1000 illustrations
Tome 4 : France sud-est (à paraître)
Tome 5 : Front du nord-est (à paraître)




Incroyablement bien pensé, didactique, chaque tome donne des informations sur la localisation des formations, leur fonctionnement, le nombre de lits, les dates d'ouverture et de fermeture. Mais aussi, des précisions sur la chaîne sanitaire, l'organisation et le fonctionnement des structures. Riche d'images multiples et de marques postales sanitaires, la série n'aborde toutefois que les seuls hôpitaux militaires et ne présente pas les structures comme les foyers, les cantines, etc. que l'on trouve dans l'ouvrage de Max Altarovici.

En définitive ce sont 10 000 hôpitaux qui auront été étudiés au terme du 5e tome.

Trois ouvrages sont déjà parus avec une appréciable régularité. Ils sont incontournables si vous vous intéressez à l'histoire de la CRF, du service de santé, des infirmières ou de la Grande Guerre. Vous pouvez vous les procurer via YSEC ou sur des sites de vente comme Amazon.fr

Frédéric Pineau

* Ouvrage épuisé que l'on peut trouver d'occasion sur des sites comme e.bay ou Delcampe.